La crise du Covid avait tout paralysé depuis mars 2020, y compris l'intérêt des Français pour la chose civique. Elle semble s'éloigner. Or, l'échéance des élections départementales et régionales a pris le relais. Sur le point précis de savoir comment voter, les lecteurs de cette chronique n'éprouveront sans doute guère de surprise en apprenant ce que préconise le rédacteur de ces lignes.
En dépit d'une division des droites, qui s'est aggravée hélas depuis 1981, il faudrait pouvoir faire tout ce qui peut aller dans le sens inverse de cette querelle, attisée par Mitterrand. Il convient d'œuvrer, avant tout, et particulièrement à l'échelon régional et départemental, à la déroute de la gauche, et à la déconfiture de la prétendue république en marche.
La très courte campagne étouffe cependant à son tour, à sa manière, les vraies questions relatives aux problèmes graves de la Cité. Elle en suggère quand même quelques autres.
C'est en elle-même d'abord que cette course aux mandats locaux mériterait réflexion.
Quelque 4 000 politiciens, souvent de moindre envergure, vont ainsi acquérir un statut social plus ou moins rémunérateur. Sur le coût global de celui-ci, le contribuable, c'est-à-dire chacun des habitants de l'Hexagone, y compris celui qui n'est redevable que de la TVA, gagnerait à pouvoir s'interroger. Signalons aussi la précarité et la dépendance de ces élus : dès lors qu'ils relèvent de la représentation proportionnelle, ils ne peuvent envisager de nouveaux mandats sans l'investiture de l'appareil central parisien, qui les désigne et les place sur des listes bloquées.
Une réforme du découpage régional a été opérée, dans le plus total arbitraire, par le calamiteux Hollande en 2014. Or, la réduction à 13 de ces zones sans âme, sans identité historique et géographique, hormis la Corse et la Normandie, la Bretagne demeurant amputée de sa capitale traditionnelle, a amené la Cour des Comptes à calculer qu'en fait tout cela n'a conduit qu'à des dépenses supplémentaires, ne serait-ce que par le coût de déplacements aller et retour de Toulouse à Montpellier, de Limoges à Bordeaux, etc. L'inacceptable suppression de la région d'Alsace a conduit les départements du Haut-Rhin et du Bas-Rhin à adopter un statut inédit de région "européenne" : une grande victoire jacobine, pour sûr.
Par leur nature même, ces élections locales donnent lieu à des situations variables selon les circonscriptions usurpant le nom de Région, et les départements métropolitains.
On peut donc imaginer, souhaiter et si possible faire en sorte, que les vieux barrages artificiels sautent devant un certain nombre de réalités de terrain. Il faudra bien qu'un jour ou l'autre, les mots d'ordre parisiens mortifères tombent en désuétude ou sombrent dans le ridicule. Après 40 ans de manœuvres mitterrandiennes pourries, pardon pour le pléonasme, le plus tôt sera le mieux. Et le cas de la Provence est loin d'être unique.
En 2003, le gouvernement chiraquien, précurseur du "en même temps", a inventé l'eau sèche en disposant que, désormais, la France serait un État, à la fois, unitaire décentralisé.
Ainsi, dans le fouillis de ce qu'on appelle le millefeuille territorial, entre pseudo-régions, départements, mais aussi les regroupements de communes coiffés par les préfets, les cantons, les arrondissements qui n'existent plus qu'au titre du découpage électoral plus ou moins trafiqué, plus personne ne sait plus les responsabilités de chaque échelon administratif. C'est à cette enseigne que la lutte contre l'insécurité, préoccupation légitime de l'opinion, semble au cœur de la campagne actuelle. Or, si certains exécutifs régionaux accomplissent un effort méritoire dans la gestion des lycées, le soutien aux polices municipales ou la vidéosurveillance, les solutions d'ensemble ne dépendent pas de leurs prérogatives. L'administration de la justice et l'application des peines échappent entièrement aux collectivités locales.
Les élus ne distribuent plus que des allocations. Ils ne sont pas supposés représenter les contribuables. Ils guettent et gèrent des subventions de l'État central, tombées du ciel telle la manne nourrissant pendant 40 ans les Hébreux dans le Désert. Ils n'agissent plus qu'au gré de promesses électorales, pensées comme contractuelles, cette idée violant l'article 27 de la Constitution aux yeux duquel "tout mandat impératif est nul".
Le droit de représentation des contribuables, très ancienne origine des assemblées, est dès lors de plus en plus dénaturé et bafoué. Or, le principe "pas de taxation sans représentation" n'a pas attendu la loi anglaise sur le Sucre de 1764, pour justifier en Amérique, l'insurrection des 13 colonies contre leur Métropole. C'est bien pour des raisons de consentement à l'impôt que furent imposées en Angleterre la Grande charte du XIIIe siècle et, plus tard, après les Tudor, l'ascension et la victoire du parlement de Westminster ; de même, la convocation des États généraux à partir de 1302 reposait sur l'idée que les peuples de France ne devaient pas être considérés comme tributaires, mais libres, et qu'aucune contribution ne peut être exigée d'eux sans leur consentement.
Ce vieux principe de l'Ancien régime français ne semble plus guère compter, en notre cinquième république.
JG Malliarakis
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