Situation terrible que celle de la Grèce depuis 2009. Cette année-là fut marquée par le retour au pouvoir des socialistes. Certains imaginaient qu'ils allaient tout arranger. Ils ont tout bousillé. La nomination comme chef du gouvernement de Papandréou III, troisième représentant de cette déplorable lignée ne pouvait conduire qu'à la catastrophe.
Au début, je l'avoue moi-même, on aurait voulu imaginer une metanoïa. Celui que les Turcs appellent gentiment "Yorgo", surnommé aussi "Geoffrey", paraissait moins démagogue que son père Andreas, avec lequel il avait rompu. On revenait à une bonne vieille social-démocratie. Le parti du grand père ne s'appelait-il pas "union du centre". Bref pas de quoi fouetter un chat.
Très vite cependant il apparut que cet optimisme ne valait pas grand-chose. Georges Andreas Papandréou, "GAP", présidait, et il préside encore effectivement l'Internationale socialiste. Son grand ami s'appelait, et s'appelle probablement encore Dominique Strauss-Kahn, notre cher "DSK" national. On pourrait en France se souvenir du lamentable Herriot, qui demeura l'ambassadeur permanent du radicalisme. Après son cuisant échec ministériel, il présidera le parti et la chambre, voguant entre États-Unis et URSS. Ainsi depuis son éviction en novembre 2011, Papandréou parcourt le monde entre Costa Rica et Israël, on le voit rencontrer le ministre des Affaires étrangères britanniques pour promouvoir l'adhésion à l'union européenne de ce qu'on appelle les Balkans occidentaux, etc. Et il négocie, bien sûr, comme chef de parti, les conditions du programme de rigueur voté dans la nuit du 12 au 13 février par le parlement athénien. Quel homme indispensable.
Dans la même soirée, 93 immeubles dont 9 bâtiments historiques du centre de la capitale ont été détruits ou gravement endommagés, incendiés par des jets de cocktails Molotov.
Les gros moyens de communication hexagonaux ont largement couvert ces événements. Mais ils les ont étrangement arrangés. Les incendiaires, une poignée d'extrémistes criminels – oui, criminels car en France l'incendie volontaire est passible des Assises - n'étaient pas présentés comme tels. On ne semblait pas se douter qu'il s'agissait de commandos d'extrême gauche : ils figuraient le peuple dans un psychodrame à balles réelles.
Sans doute les députés ne représentaient-ils plus l'état exact de l'opinion, sinon le vote populaire qui les a désignés en 2009. Certains d'entre eux ont quitté les rangs de leur propre formation, environ 40 sur 300, le vote étant acquis tout de même par une très large majorité : 199 pour, 74 contre. Le chef de l'opposition de droite a lui-même expliqué une nouvelle fois les raisons du vote positif de son groupe, rappelant que le dilemme était "un sauvetage douteux ou une faillite extrême". Le pays ira vers des élections à la fin du mois d'avril, après la mise en place des accords européens.
Sans doute le parti communiste grec dispose-t-il, lui aussi, en démocratie du droit de s'exprimer. Mais que penser de la conférence de presse donnée le 13 février par sa secrétaire générale, la camarade Aleka Papariga se félicitant de troubles qui "ont créé une nouvelle scène politique, résultat de la pression exercée par le mouvement populaire des travailleurs, et c'est une petite victoire qui, cependant, peut devenir importante. (...) refusant que soit endiguée la radicalisation du mouvement, la lutte en termes de rupture et de renversement du système."
Autrement dit, elle approuve l'idée que 80 000 manifestants représentraient la volonté d'un peuple, et que quelques centaines d'émeutiers en constituent l'avant-garde légitime. Les crimes du jacobinisme et du bolchevisme se trouvent aujourd'hui encore, en germe dans cette dialectique, racine du terrorisme.
Naturellement aucun chroniqueur parisien, malgré la grande proximité des deux pays, en dépit des intérêts très puissants de la France en Grèce, n'a osé jusqu'ici souligner cet aspect de la situation.
Celle-ci ne relève pas de la tragédie, au sens antique. Elle n'a pas été marquée par une fatalité scellée par les dieux. Elle appartient à la sphère du drame, c'est-à-dire à la volonté, à l'intelligence et au courage des hommes, ou au contraire à leur lâcheté ou à leur sottise.
On veut dénoncer aujourd'hui à tout prix comme une crise du "capitalisme" ce qui correspond en fait à la crise des États-Providence ouest européens. On appelle crime de la finance la volonté de ne plus investir dans des prêts à des administrations surendettées.
Mais, enfin, si vous ne voulez pas dépendre des vautours ne leur livrez pas la chair de votre peuple !
Malheureusement pour la Grèce comme pour la France, il existe une rhétorique constante et lancinante des dirigeants de la gauche et de trop de perroquets qui leur font écho à droite.
Elle s'exprimait de la manière parfaitement claire et nue dans les propos du représentant communiste à la commission des finances de l'Assemblée nationale française, le camarade Jean-Claude Sandrier : "La dette de l’État n’est pas due à la dépense publique". Ce titre résumait l'entretien publié par L’Huma le 20 octobre 2011
"L’argent aurait-il disparu ?…" lui demandait alors le journal du parti ? et de répondre : "L’argent existe. Il faut en finir avec l’ensemble des cadeaux fiscaux aux plus riches etc".
On retrouve ce discours non seulement dans tous les médiats parisiens quand ils parlent de la crise grecque, quand ils la présentent comme un simple résultat de la "fraude fiscale". Mais elle s'exprime plus gravement encore dans l'Hexagone lorsque la CGT prend la parole.
Et cela se reflète, malheureusement aussi, de manière voilée, dans le programme de François Hollande grâce auquel, veut-on nous faire croire, "l'argent existera", le jour où, bien entendu, il rasera gratis.
JG Malliarakis
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